« L’abstraction est une éthique, un mode de vie qui s’adapte. »
JEAN DEWASNE
Né à Lille en 1921 et décède en 1999 à Paris.
À la fois praticien et théoricien, Jean Dewasne a développé son propre système artistique dès la fin des années 1940, poursuivant inlassablement la voie qu’il avait tracée. Figure incontournable de l’abstraction géométrique et de l’art construit, il possède une formation pluridisciplinaire, ayant étudié aussi bien l’architecture, la musique, la philosophie que les mathématiques et les beaux-arts. Il a défendu ses théories au sein du fameux Atelier d’art abstrait, qu’il a fondé en 1946 avec son ami Edgar Pillet, et qui forma de nombreux artistes venus du monde entier. Pour comprendre la démarche de Jean Dewasne, il est important de se rappeler que son parcours artistique a été façonné par ses goûts pour la musique, mais aussi pour les sciences. Au-delà de ses articles sur les liens entre les mathématiques et l’art abstrait, il a notamment étudié la géométrie non euclidienne, la topologie, les espaces à n-dimensions, la logique floue et le ruban de Möbius. Ces concepts mathématiques ont offert aux artistes la possibilité de sortir du cadre traditionnel de la surface plane pour explorer des espaces courbes, voire sphériques. Dewasne lui-même a exploité ces idées sur lesquelles il a surenchéri : « Il n’y a plus de véritables droites ni de véritables parallèles. Les angles droits vont en s’écartant ou en s’amenuisant selon qu’ils évoluent sur une surface bombée ou creuse. Les quantités de surface ne seront plus jamais stables. »
La priorité de Jean Dewasne était la capture de l'intensité maximale de la couleur tout en respectant les principes de topologie. Cela nécessitait de travailler en aplats sur un support inaltérable et l’a conduit à renoncer à la toile au profit d’un nouveau matériau, l’Isorel. Cette recherche l’a amené à s’intéresser aux objets industriels utilisés comme supports. Il invente alors les « Antisculptures », un terme reflétant bien sa démarche, pour lesquelles il explique : « Le principe de l’Antisculpture : j’ai trouvé des formes toutes faites dans l’industrie qui m’ont servi de support, et sur lesquelles j’ai peint comme s’il s’agissait de tableaux. » Contrairement à sa méthode habituelle d'élaboration de tableaux, Dewasne ne recourait à aucun dessin ni gouache préparatoire pour ses Antisculptures ; il travaillait directement et en improvisation sur la forme. Pour lui, il existe deux façons d'appréhender la couleur : la « couleur lumière », par l’étude du spectre solaire pour en extraire les couleurs à l’état pur ; et la « couleur matière », obtenue à partir des pigments chimiques qu’il étudie dans les publications des ingénieurs de chez Philips. Les conquêtes plastiques de Dewasne lui ont permis de réaliser des ensembles de plus en plus vastes, tant en France qu’à l’étranger, pays où il était régulièrement invité. Outre ses Antisculptures, les sérigraphies et les tapisseries, il convient de mentionner, parmi ses oeuvres monumentales et identitaires de son langage visuel, les murales réalisées pour l'usine Gori au Danemark (1979), le Stade de glace de Grenoble (1968), la Grande Arche de la Défense (1989) et des fresques pour les métros de Hanovre (1975) et de Rome.
Jean Dewasne, illustre cofondateur du Salon des Réalités Nouvelles et lauréat du premier prix Kandinsky en 1946, a marqué de son empreinte la Biennale de Venise en 1968 en tant que représentant de la France. Son influence est particulièrement palpable dans l'architecture colorée et distinctive du Centre Georges- Pompidou. En effet, l'édifice aurait eu une toute autre allure sans ses contributions, privé de ses emblématiques nuances de bleu, vert et rouge. L'histoire de cet apport est fascinante : en 1970, alors résident du Marais, Jean Dewasne visite Renzo Piano et Richard Rogers, architectes du projet, dans leur bureau parisien du boulevard Sébastopol. Ils lui présentent une maquette entièrement grise du futur centre culturel. Persuadé qu'il pouvait améliorer ce concept, Dewasne les convie dans son atelier de la rue du Bourg- Tibourg, où il avait déjà appliqué sa vision chromatique aux conduites, les transformant en oeuvres d’art.
Une oeuvre toujours en avant-garde, celle de l’artiste qui a élevé l’abstraction en matérialisant un nouveau domaine, issu des vertigineuses découvertes de la mathématique contemporaine, tout en restant fidèle à la peinture, sa soeur des mondes sensoriels. Tel était le dessein de Jean Dewasne : édifier un monde nouveau, « le monde des passions et des élans créateurs qui s’entrelace avec celui des mathématiques les plus subtiles. Alors les univers du rêve, de la magie et de la plus haute rationalité vont s’unir au vif le plus précieux de l’homme. »
Sélection d’estampes disponibles dans la boutique
Sélection des expositions
• 2015, L.A.A.C, Dunkerque, France
• 2014, Musée des Beaux-Arts Cambrai, Cambrai, France
• 2014, Musée Départemental Matisse, Le Cateau-Cis, France
• 2010, Messmer Fondation, Riegel, Allemagne
• 2009, Stattgalerie Klagenfurt, Autriche
• 2008, Musée Ingres, Montauban, France
Oeuvres dans les musées et collections publiques
• M.N.A.M Centre Georges Pompidou, Paris, France
• M.A.M de la Ville de Paris, Paris, France
• Musée de Grenoble, Grenoble, France
• La Grande Arche de la Défense, Paris, France
• Musée Départemental Matisse, Le Cateau-Cis, France
• Musée des Beaux-Arts Cambrai, Cambrai, France
• L.A.A.C., Dunkerque, France
Prix
• Prix Kandinsky, 1946